Région: Quel risque nucléaire dans le midi ?
Édition du lundi 14 mars 2011
La centrale de Tricastin, voisine du Gard, est sur l’une des trois zones ayant connu par le passé ce que les spécialistes appellent un « séisme historique notable ». La catastrophe que vit actuellement le Japon ravive la peur d’un accident nucléaire. Notamment dans le Midi, car le Sud-est de la France est une région sismique, où le risque est certes « modéré », mais il est bien présent.
Pour preuve : le site nucléaire de Tricastin, installé sur les départements du Vaucluse et de la Drôme, sur Pierrelatte et trois autres communes, est implanté sur l’un des secteurs les plus exposés. La zone où il se trouve est encadrée par deux failles, celle des Cévennes et celle de Nîmes. Or, malgré une sismicité jugée modérée, par le passé la terre a, par trois fois, bougé plus qu’elle ne l’avait fait de mémoire d’homme : à Manosque (en 1708), à Lambesc, près d’Avignon (en 1909) et… à Tricastin (en 1873).
« Trois séismes historiques » jugés « notables », fut-il rappelé le 7 décembre dernier en Avignon, lors d’une journée organisée sur le thème du « risque sismique et les installations nucléaires », à l’initiative de l’Autorité de sûreté nucléaire, l’ASN, la structure chargée de contrôler les installations françaises.
Trois séismes dévastateurs, dont un sur la zone Tricastin
Ces trois séismes ont été dévastateurs. La catastrophe qu’a vécue Lambesc est mieux connue. D’une magnitude estimée à 6,2 sur l’échelle de Richter, elle a tué une quarantaine de personnes. En outre, progrès oblige, des photos ont pu être faites, à l’époque, du champ de ruines laissées par le tremblement de terre.
Or, à l’échelle du temps géologique, 1909 c’était hier. Malgré tout, la France a pris la décision de créer sur ces zones sensibles du Sud des installations nucléaires, en tenant compte dans les constructions de l’ampleur du risque encouru. Chez EDF, l’exploitant de la centrale de Tricastin, on se veut d’ailleurs rassurant. « Le séisme de 1873 avait une magnitude de 4,7 sur l’échelle de Richter. Nos installations ont donc été dimensionnées, lors de leur conception, pour qu’elles résistent à un séisme beaucoup plus important, d’une magnitude de 5,2 », précise Thierry Piron, l’un des membres de l’équipe de direction de la centrale.
Une réponse qui ne satisfait pas franchement Roland Desbordes. « Le discours officiel, c’est de dire que le risque sismique est bien pris en compte. Mais, à ma connaissance, Cruas (en Ardèche) serait la seule centrale de la vallée du Rhône, pour laquelle il y eut de vrais aménagements antisismiques », rétorque le président de la Criirad, une association qui défend le droit à l’information sur la radioactivité et le nucléaire.
Mais, selon lui, le danger réside moins dans la solidité des bâtiments des installations, plutôt robustes admet-il, que dans le risque d’une inondation. « En vallée du Rhône, on n’a peut-être pas de tsunamis, mais on a des barrages qui ne sont pas construits selon les normes antisismiques », affirme-t-il. Un argument écarté par la direction de Tricastin. « Nous avons pris en compte le niveau de crue millénale le plus haut enregistré avec protection de digues dimensionnées en conséquence et nul doute que ce qui se passe au Japon nous servira de retour d’expérience », répond Thierry Piron.
PIERRE BRUYNOOGHE pbruynooghe@midilibre.com